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Élections québécoises d’octobre 2018. Le ballet des fausses gaugauches

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YSENGRIMUS   Dans les dernières quinze années, le vieux glacier poreux du Parti Québécois s’est définitivement lézardé. Il a perdu forces lamelles sur sa gauche. Les pertes à gauche au Parti Québécois sont à la fois parlementaires et électorales. Il est foutu, désormais. Les électeurs gauchisants du Parti Québécois sont inexorablement, ponctionnés, par la formation de centre-gauche Québec Solidaire qui, de plus en plus solidement, se parlementarise. À gauche du grand glacier quinquagénaire foutu du Parti Québécois, on a donc eu un écoulement, une fuite chuinteuse, une liquéfaction pleureuse qui, de plus en plus perceptiblement, le mine, le tue.

Sur la droite du Parti Québécois, la fracture interne avait été beaucoup plus abrupte. Le député ex-péquiste Francois Legault se lève d’abord, en 2011, et mène la fronde d’une poignée de transfuges droitiers. Il quitte le Parti Québécois avec eux, d’un coup sec, et part fusionner avec ce petit parti de mouches du coche bombinantes de droite qu’avait été l’Action Démocratique du Québec. La bande des transfuges péquistes droitiers à Legault dissous et absorbe l’ADQ, en peu de mois, s’arrogeant, dans le mouvement, le nouveau nom, largement surfait, pompeux et insignifiant, de Coalition Avenir Québec. Son ambition n’est ni modeste ni implicite. De fait, la jubilation rassembleuse des droites pousse rapidement Francois Legault à sereinement comparer son parti à l’Union Nationale (de Duplessis).

Dans ce dispositif d’équilibristes, passablement malsain et hostile au demeurant, le Parti Québécois représente de plus en plus le Centre étriqué et cerné de la politique parlementaire québécoise. En cela, il reflète de moins en moins la société civile (toujours passablement survoltée par les luttes récentes ayant mobilisé toute une génération au sens critique de plus en plus en alerte). Pour compenser la plus empirique des pertes subit par sa nette dissolution, le Parti Québécois a cherché, pendant son court mandat minoritaire d’adieu, en 2012, à ratisser à droite. Tel fut le but exclusif, délétère et minable de la Charte des Valeurs Ethnocentristes et Démagogiques qui fit avancer la perte péquiste de plusieurs crans. Cet appel du pied des droites idéologiques (sinon fiscales) fut, de fait, un échec cuisant, fermement sanctionné par l’électorat, et qui a, implacablement, entraîné la démission de la cheffe d’alors de cette formation, Madame Pauline Marois.

Depuis, le naufrage péquiste prend désormais de plus en plus corps politiquement (la gauche d’un bord, les droitiers de l’autre, les hyper-nationaleux dans leur petit coin, le centre-droite qui s’enfonce). Il est hautement improbable que cela soit réversible. L’effritement de cette formation politique vermoulue, qui marqua l’imaginaire d’une génération, est si important en proportion qu’il ne fut pas sans impact parlementaire. Les législatures québécoises, depuis la confédération canadienne (1867) avaient été, dans leur quasi totalité, constituées de gouvernements majoritaires. Si on excepte l’accident historique de 1878 (marquant l’ouverture de la transition libérale), on peut dire que les gouvernements québécois, une fois élus, n’eurent pas trop de problèmes de conciliation et/ou de copinage parlementaire entre les partis. On observe cependant, depuis 2007, la manifestation sensible de la mise en place insidieuse d’une certaine culture des gouvernements minoritaires à l’Assemblée Nationale. Voyons un peu la liste historique des gouvernements minoritaires au Parlement de Québec:

1878 (durée de vie de vingt mois)
Premier ministre: Henri-Gustave Joly de Lotbinière
Gouvernement (minoritaire): Parti Libéral
Second parti de coalition: Conservateurs indépendants
Opposition: Parti Conservateur

2007 (durée de vie de vingt et un mois)
Premier ministre: Jean Charest
Gouvernement (minoritaire): Parti Libéral
Première opposition: Action Démocratique du Québec
Seconde opposition: Parti Québécois

2012 (durée de vie de dix-huit mois)
Première ministre: Pauline Marois
Gouvernement (minoritaire): Parti Québécois
Première opposition : Parti Libéral
Seconde opposition : Coalition Avenir Québec

Ceci dit, il est clair que cet impact parlementaire minorisant de la nouvelle porosité friable du parlement a fait l’objet, à cette élection-ci, pour une seconde fois consécutive, d’un rejet. Patapoliticistes comme ils le sont toujours un peu désormais, les québécois voulaient stabiliser les effets perturbateurs du mouvement de fonte du gros glacier bleu et blanc et maintenir une chambre majoritaire (et ce, malgré l’existence désormais stabilisée de quatre partis). Aussi, moins politiciens au sens traditionnel qu’adeptes de plus en plus virulents et myopes du voter contre, les électeurs ont rejeté en bloc le Parti Libéral, les vieux capitaines de milices ronrons, coloniaux, plombiers et méprisables. Le vote actuel fut, l’un dans l’autre, bien plus conservateur que quoi que ce soit d’autre. On a voulu remettre la bonne réaction gériatrique bien en selle. Et, pour ce faire, on vient donc de positionner en force la Coalition Avenir Québec, les réacs pseudo-autonomistes, xénophobes, affairistes, hypocrites et véreux.

Ce sont des petits combinards méprisables et la force apparente de leur victoire actuelle ne doit en rien laisser croire qu’ils se soient spécialement crédibilisés. C’est le retour par ressac réitéré de la fédérastie pense-petit et veule (le Canada anglais, qui n’y comprend rien, ne verra que le prisonnier se résignant derechef et ne brassant plus sa cage), de la droite ordinaire qui, tout tranquillement, se croit encore et encore propriétaire du pouvoir, du copinage impudent, du gaz de schiste, et des grandes magouilles d’infrastructures. Mais… bon… hein… les électeurs ne retourneront pas aux urnes dans vingt mois mais, en bonne tradition ronron, dans quatre ou cinq ans. Ils ont maintenant la paix électorale jusqu’à la prochaine fois. Pour ce qui est de la paix sociale, par contre, là, c’est une toute autre chose. Le troc pourrait s’avérer assez ardu à terme. C’est qu’on assiste bel et bien ici à un retour subtil mais ferme aux conditions sociales de 2012… l’année du sommet de la crête de la lutte des carrés rouges. C’est donc à suivre.

On préfère donc de loin, pour le moment, un gouvernement réac à un gouvernement minoritaire. Le poids du pouvoir effectif prend pesamment le dessus. Le fait est que, dans le mode parlementaire de type Westminster, si la chambre refuse à un gouvernement minoritaire une décision de nature budgétaire, celui-ci est automatiquement et mécaniquement dissous et des élections sont déclenchées. Mais l’élection est un exercice désormais hautement impopulaire et le parti qui prendrait l’initiative de la déclencher risquerait de le payer cher (en voyant le gouvernement minoritaire qu’il enquiquinait devenir majoritaire). Donc, du moins au début, la droite libérale, aux abois, réduite, niquée, ratatinée, va plutôt tenter de picosser les projets de loi, les amender, les infléchir, pour éviter d’involontairement aggraver le marasme majoritaire en place. Et comme nos bons amis du centre mou ne sont pas si inattentifs que ça aux velléités de la droite, ça pourra se faire mousser un bon petit moment au centre-gauche aussi… pour le moins pire ou pour le pire… Ceci dit, le fond de l’affaire, c’est que, pour le moment, les réactionnaires ont le plein contrôle. Ils vont pas se gêner, maintenant, pour bien servir leurs maîtres capitalistes fétides. Les masques vont vite tomber.

Car ce fut indubitablement une danse des masques. Effectivement, l’un dans l’autre, le trait saillant de cette campagne électorale de 2018 aura été la nuée des questionculae de fausse gaugauche qui fusèrent de partout. Chaque parti investissait beaucoup d’énergie verbale à promettre trente-six micro-cossins pour le confort douillet des uns et des autres, en se donnant des grands airs entendus de réformiste sociétal crucial. En même temps les partis les plus réacs dissimulaient soigneusement les portions les plus sombres, les plus ethnocentristes et les moins écologiques de leur programme (et il y en a pas mal, surtout à droite). Quant aux Solidaristes, ils se réfugiaient dans le discours creux des vastes causes (notamment la sacro-sainte cause écolo, ce grand marécage où il fait si bon de bien couler la lutte des classes) en se comportant littéralement comme le Bonhomme Carnaval au plan des promesses. La droite fut minable, couillonne et hypocrite. La gauche fut écolo-pas-anti-capi, ronflante et abstraite. Le tout fut globalement plombier, au ras des mottes, ronron et sans grand intérêt intellectuel ou matériel. Le faux changement toc et inepte est désormais en place. Dormez tranquille. Les vieux partis du bon vieux temps (Libéraux et Péquistes) sont tout doucement en train de se faire tasser par leurs versions 2.0. (Caquistes et Solidaristes).

Rappel du résultat des élections du 1 octobre 2018 au Québec

Nombre de sièges à l’Assemblée Nationale: 125
Nombre de sièges requis pour détenir une majorité parlementaire: 63
Nombre de sièges à la Coalition Avenir Québec: 74
Nombre de sièges au Parti Libéral: 31
Nombre de sièges à Québec Solidaire: 10
Nombre de sièges au Parti Québécois: 10

Gouvernement majoritaire de la Coalition Avenir Québec avec le Parti Libéral formant l’Opposition Officielle. et Québec Solitaire et le Parti Québécois formant (on sait pas trop encore comment) la Seconde Opposition.


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